DOSSIER : SCT-7001-20 RÉFÉRENCE : 2023 TRPC 2
DATE : 20230131
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TRADUCTION OFFICIELLE
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TRIBUNAL DES REVENDICATIONS PARTICULIÈRES
SPECIFIC CLAIMS TRIBUNAL
ENTRE :
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BANDE INDIENNE DE COOK’S FERRY Revendicatrice (Intimé) |
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Me Darwin Hanna, Me Nicole Hajash et Me Caroline Roberts, pour la revendicatrice (Intimé) |
– et – |
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SA MAJESTÉ LE ROI DU CHEF DU CANADA
Représenté par le ministre des Relations Couronne‑Autochtones Intimé (Intimé) |
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Me James Mackenzie et Me Peri Smith, pour l’intimé (Intimé) |
– et – |
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CICYETKWU DUNSTAN
Pour son propre compte et pour le compte des autres membres de la Nation des Pukaist de la Nation des Nlakapamux
Demanderesse
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Me Matthew Howard, pour la demanderesse
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ENTENDUE: Le 20 janvier 2023
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MOTIFS SUR LA DEMANDE
L’honorable Diane MacDonald
NotE – Le présent document pourrait faire l’objet de modifications de forme avant la parution de sa version définitive.
Jurisprudence :
Bande indienne de Cook’s Ferry c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2022 TRPC 3; Bande indienne Metlakatla c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2018 TRPC 4; Carter v Canada (PG),2012 BCCA 502; Ahousaht Indian Band v Canada (Attorney General), 2012 BCCA 330; Nation Tsleil-Waututh c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2014 TRPC 11; Rothmans, Benson & Hedges Inc c Canada (Procureur général), [1990] 1 CF 74; Première Nation Pictou Landing c Canada (Procureur général), 2014 CAF 21; Bande Beardy’s et Okemasis nos 96 et 97 c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2012 TRPC 1; EGALE Canada Inc v Canada (AG), 2002 BCCA 396; R v Watson and Spratt, 2006 BCCA 234.
Lois et règlements cités :
Loi sur le Tribunal des revendications particulières, LC 2008, c 22, art 14, 15, 22 et 25.
Règles de procédure du Tribunal des revendications particulières, DORS/2011-119, règle 45.
TABLE DES MATIÈRES
III. Thèses de la demanderesse et des parties
B. Application des principes juridiques
1. L’intérêt direct dans l’instance
4. L’autre moyen pour la demanderesse de faire valoir sa cause dans le système judiciaire
6. Statuer sur le fond sans l’aide de l’intervenante
I. Introduction
[1] Le Tribunal des revendications particulières (le Tribunal) est appelé à se prononcer sur une demande d’autorisation d’intervention (la demande) dans l’affaire Bande indienne de Cook’s Ferry c Sa Majesté le Roi du chef du Canada dont il est actuellement saisi. Cicyetkwu Dunstan est la partie demanderesse (la demanderesse). Elle déclare être la représentante d’une collectivité autochtone titulaire de droits non encore reconnue, la Nation des Pukaist. Sa demande a été instruite par vidéoconférence le 20 janvier 2023.
[2] La demande fait suite à un avis délivré à Cicyetkwu Dunstan en mars 2022, conformément à l’article 22 de la Loi sur le Tribunal des revendications particulières, LC 2008, c 22 [la LTRP]. Celui‑ci a été délivré après que l’avocat de Cicyetkwu Dunstan eut écrit à la revendicatrice et à l’intimé pour leur faire part de préoccupations quant à l’entente sur le bien‑fondé de la revendication décrite dans l’ordonnance sur consentement prononcée à cet égard par le Tribunal en janvier 2021. Les parties ont porté à l’attention du Tribunal la lettre de Cicyetkwu Dunstan. Il faut souligner que l’avis délivré conformément à l’article 22 a été envoyé à Cicyetkwu Dunstan en sa qualité personnelle parce que la Nation des Pukaist n’est pas reconnue par le Canada, ce qui empêchait le Tribunal donner avis à cette dernière en tant que collectivité (Bande indienne de Cook’s Ferry c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2022 TRPC 3 au para 7).
[3] Par conséquent, Cicyetkwu Dunstan ne peut demander l’autorisation d’intervenir que pour son propre compte et non pour celui de la Nation des Pukaist.
[4] J’établirai d’abord brièvement le contexte de la demande pour ensuite examiner les thèses de la demanderesse et des parties. Je me pencherai ensuite sur les principes juridiques applicables à une demande d’intervention ainsi que sur les différents facteurs dont le Tribunal a déjà tenu compte par le passé. Puis, j’examinerai les restrictions inhérentes à la compétence du Tribunal. Enfin, j’analyserai l’ensemble de ces facteurs dans le contexte propre à l’espèce.
[5] Je rejette la demande de Cicyetkwu Dunstan au vu de la nature de ses prétentions, des actes de procédures versés au dossier de la revendicatrice soumis au Tribunal et des critères balisant le droit d’intervenir appliqués antérieurement par le Tribunal. Je m’appuie également sur la compétence restreinte que confère au Tribunal sa loi habilitante, la LTRP, pour rejeter la présente demande. Cicyetkwu Dunstan n’a pas satisfait au critère juridique applicable en matière d’intervention établi par la LTRP et la jurisprudence pertinente.
II. Contexte
[6] La revendicatrice, la bande indienne de Cook's Ferry, fait partie, avec 14 autres Premières Nations, de la Nation des Nlaka’pamux. Celle‑ci est établie au cœur des terres de la province de la Colombie‑Britannique, à environ 150 kilomètres à l’ouest de Kamloops.
[7] La bande indienne de Cook's Ferry a déposé sa déclaration de revendication auprès du Tribunal le 14 juillet 2020. Elle y allègue que des terres d’une superficie de 8,80 acres ont été illégalement prises en 1928 de la Réserve indienne no10 de Pokheitsk (RI 10), puis que d’autres terres d’une superficie de 2,48 acres ont aussi été prises en 1968.
[8] La revendication a rapidement fait l’objet d’un règlement après que la Couronne eut admis qu’elle avait contrevenu à son obligation de fiduciaire envers la Première Nation en prenant illégalement ces terres. Le 14 janvier 2021, le Tribunal a prononcé une ordonnance sur consentement visant le bien‑fondé de la revendication. Depuis, les parties cherchent à s’entendre sur le montant de l’indemnité.
[9] Cicyetkwu Dunstan affirme qu’elle représente la Nation des Pukaist, une collectivité autochtone titulaire de droits non encore reconnue au Canada. Elle a déposé, au nom de cette prétendue Nation, une action en revendication de titre ancestral devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique le 15 septembre 2020 (Greffe de Kamloops no KAM-S-S-59310). Cette cour a compétence inhérente pour trancher une telle action. Dans cette affaire, Cicyetkwu Dunstan fait valoir que les membres de la Nation des Pukaist et ceux de la bande indienne de Cook's Ferry ont été erronément réunis en un seul groupe. Elle sollicite différentes réparations, y compris une [traduction] «
déclaration selon laquelle la Nation des Pukaist détient un titre ancestral sur l’ensemble ou une partie du territoire traditionnel des Pukaist
»
(affidavit de Cicyetkwu Dunstan, pièce A). Cette affaire est toujours pendante et en est à ses débuts.
[10] Selon Cicyetkwu Dunstan, le territoire visé par la revendication de titre ancestral de la Nation des Pukaist empiète sur les terres de la RI 10, pour lesquelles la bande indienne de Cook's Ferry sollicite une indemnité. Cicyetkwu Dunstan fait valoir que la RI 10 se trouve sur le territoire traditionnel de la Nation des Pukaist et qu’elle aurait dû être mise de côté à l’usage des membres de sa Nation.
[11] Cicyetkwu Dunstan a déclaré que le territoire traditionnel des membres de la Nation des Pukaist couvrait une superficie d’environ 34 000 hectares. Voici ce qu’elle affirme dans son affidavit :
[traduction] Les frontières du territoire s’étendent approximativement d’Ashcroft sur la Rivière Thompson à Spences Bridge, et sont délimitées par Nekumcheen, Pokheist Creek, Pimanius, Toketic, Spatsum et Nepa, jusqu’à Logan Lake, Chilthnux et 24 Mile Lake (maintenant connu comme étant la Réserve indienne no13), Enquot-co (maintenant connue comme étant la Réserve indienne no14) et Sque‑tan-kil-hats (maintenant connue comme étant la Réserve indienne no15 [...]) [para 5].
[12] Les parties conviennent que la RI 10 a été attribuée à la bande indienne de Cook's Ferry en ou vers 1880. Cicyetkwu Dunstan soutient que les raisons de cette attribution sont obscures. Son avocat a plaidé que c’était [traduction] «
principalement causé par l’isolement du village, qui n’était pas situé sur les routes habituellement fréquentées par les colonisateurs
»
et que, de ce fait, son existence a échappé au regard du commissaire des Indiens Sproat lorsqu’il a effectué les attributions de terres (enregistrement sonore de l’audience du 20 janvier 2023 à environ 12 h 09, heure de l’Est (Ottawa)). Cicyetkwu Dunstan fait valoir que la Nation des Pukaist et la bande indienne de Cook's Ferry ont été erronément réunies en un seul groupe par les autorités coloniales et que les terres pour lesquelles cette dernière réclame maintenant une indemnité auraient dû être attribuées à la Nation des Pukaist.
[13] La revendicatrice soutient que, par conséquent, les membres de la Nation des Pukaist ne sont pas, au regard de la Loi, une collectivité titulaire de droits distincte de la bande indienne de Cook's Ferry. Cicyetkwu Dunstan souligne qu’après l’attribution des terres à la bande indienne de Cook's Ferry, la Nation des Pukaist a continué d’être désignée de façon distincte dans les rapports annuels de 1884 et de 1909 produits par le ministère des Affaires indiennes. Elle l’a également été dans la lettre du 10 mai 1911 envoyée à l’honorable Frank Oliver, qui a été signée par 68 chefs de diverses Nations.
[14] Outre sa prétention voulant qu’elle soit membre de la Nation des Pukaist, Cicyetkwu Dunstan reconnaît qu’elle est une membre inscrite de la Première Nation de Lytton qui, elle, est reconnue par le Canada.
[15] En mars 2022, l’avis prévu à l’article 22 a été envoyé à Cicyetkwu Dunstan. Le 14 juin 2022, Cicyetkwu Dunstan a déposé une demande d’autorisation accompagnée d’un avis.
[16] Le 26 septembre 2022, les parties ont signalé dans une lettre conjointe qu’elles étaient parvenues à une entente de principe sur le montant de l’indemnité. Elles sont, à l’heure actuelle, en train de mettre la dernière touche au règlement à l’amiable, qui n’a pas encore été signé par elles ni ratifié par les membres de la bande indienne de Cook's Ferry.
III. Thèses de la demanderesse et des parties
A. Demanderesse
[17] La personne qui se propose d’intervenir, Cicyetkwu Dunstan, sollicite l’autorisation d’intervenir en l’espèce. Elle fait valoir en définitive que la Nation des Pukaist devrait être reconnue comme une [traduction] « collectivité autochtone titulaire de droits »
par le Canada, et qu’elle devrait également se voir reconnaître le titre ancestral des terres qu’elle revendique, y compris la RI 10 (observations écrites de la demanderesse, aux para 2b et 3). Elle soutient, au paragraphe 12 de ses observations écrites, que [traduction] «
les membres de la Nation des Pukaist estiment qu’ils forment la collectivité légitime avec qui le gouvernement fédéral devrait entamer des négociations sur les terres préemptées de la RI 10
».
La position de Cicyetkwu Dunstan peut être résumée de la manière suivante :
[traduction] En résumé, la position tenue par Mme Dunstan, au nom des membres de la Nation des Pukaist, était et continue d’être que la Première Nation des Pukaist, quoique faisant partie de la Nation des Nlaka’pamux, était depuis des temps immémoriaux une collectivité indépendante formée de membres d’une Première Nation et qu’elle et la bande indienne de Cook's Ferry ont été erronément réunies en un seul groupe par l’administration coloniale de l’époque. Tous les droits qui devaient être attribués à la Première Nation de Pukaist, mais qui ont été dévolus la bande indienne de Cook's Ferry, devraient être réexaminés et, dans presque tous les cas, sinon tous, être transférés à la Première Nation des Pukaist. La Première Nation Pukaist a l’intention de se gouverner elle‑même. [observations écrites de la demanderesse au para 9]
[18] C’est sur ce fondement que Cicyetkwu Dunstan demande au Tribunal, dans le cadre de la présente demande :
d’annuler l’ordonnance sur consentement visant le bien‑fondé de la revendication du 14 janvier 2021;
à titre subsidiaire, de mettre en suspens l’ordonnance sur consentement visant le bien‑fondé de la revendication du 14 janvier 2021 jusqu’à l’issue de l’instance devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique;
et, sous‑subsidiairement, de lui accorder l’autorisation d’intervenir.
[19] Bien qu’en définitive, Cicyetkwu Dunstan souhaite que le Tribunal annule — ou mette en suspens — l’ordonnance sur consentement visant le bien‑fondé de la revendication, ses observations portent essentiellement sur la question de l’intervention, ce qui n’est pas surprenant, car la présente audience n’est pas le forum approprié pour entendre les observations sur les mesures de réparation qu’elle sollicite. Avant de pouvoir légitimement présenter des observations relatives à l’ordonnance sur consentement visant le bien‑fondé de la revendication, Cicyetkwu Dunstan doit se voir reconnaître la qualité d'intervenante.
[20] Malgré l’accent qu’elle met sur la question de l’intervention, Cicyetkwu Dunstan fait valoir que sa demande soulève deux questions importantes :
[traduction]
a. L’attribution des terres de la Réserve indienne no 10 de Pokheitsk à la bande indienne de Cook's Ferry en 1878 est‑elle irrégulière du fait que le territoire mis de côté pour les membres de la Nation des Pukaist, une collectivité autochtone distincte et indépendante, aurait dû leur être attribué?
b. Alors que la légitimité de l’attribution des terres de la Réserve indienne no 10 de Pokheitsk est remise en cause par un tiers après la clôture des actes de procédure, l’intimé, qui était selon toute apparence dans l’ignorance de cet enjeu, peut‑il continuer à affirmer que cette irrégularité alléguée n’est pas en cause dans les actes de procédure? [observations écrites de la demanderesse au para 13]
[21] Cicyetkwu Dunstan soutient que le maintien de cette irrégularité l’empêche de faire valoir sa cause.
[22] Peu après la tenue de l’audience, et avec l’autorisation du Tribunal, la demanderesse a déposé des documents supplémentaires relatifs au nom légal d’un membre de la bande indienne de Cook’s Ferry. Le Tribunal juge que ces documents n’ont aucun rapport avec la question de l’intervention, et ordonne donc au greffe de les retirer du dossier puisqu’ils ne devraient pas être produits en preuve. La revendicatrice a, elle aussi avec l’autorisation du Tribunal, déposé une lettre pour répondre aux documents supplémentaires envoyés par la demanderesse. Étant donné que les documents de la demanderesse ne sont pas pertinents et doivent être retirés du dossier, le Tribunal ordonne également au greffe de retirer cette lettre du dossier puisqu’elle non plus ne devrait pas être produite en preuve.
B. Revendicatrice
[23] La revendicatrice conteste par quatre moyens la demande d’intervention :
la demanderesse ne possède pas d’intérêt véritable dans la revendication;
les affirmations de la demanderesse ne suffisent pas pour établir un intérêt dans la revendication;
l’intervention de la demanderesse n’aidera pas le Tribunal à statuer sur l’affaire;
l’intervention de la demanderesse ne sert pas les intérêts de la justice (observations écrites de la revendicatrice, déposées le 13 octobre 2022, au para 40).
[24] Bref, la revendicatrice plaide que, si Cicyetkwu Dunstan n’a pas d’intérêt véritable dans la revendication, c’est parce qu’elle n’a aucun intérêt dans les questions en litige qui y sont soulevées. Selon elle, les questions soulevées par la demanderesse sont plutôt fondées sur des affirmations relatives à un titre et à des droits ancestraux ainsi qu’à l’attribution irrégulière des terres de réserve, lesquelles sont des questions qui [traduction] «
outrepassent la compétence du Tribunal ou dont il n’est pas saisi selon les actes de procédure actuels
»
(observations écrites de la revendicatrice au para 44).
[25] La revendicatrice soutient que les affirmations de Cicyetkwu Dunstan ne sont pas corroborées et qu’il ne s’agit donc que de simples affirmations dénuées de tout lien juridique ou factuel avec la présente revendication. Par conséquent, Cicyetkwu Dunstan n’a pas établi l’intérêt voulu pour se voir accorder l’autorisation d’intervenir.
[26] La revendicatrice fait valoir que, faute d’un intérêt direct dans l’instance, la personne qui se propose d’intervenir ne peut y être ajoutée comme partie que si une question de droit public est soulevée et qu’elle peut apporter un point de vue qui sera utile au Tribunal. La revendicatrice avance qu’aucun intérêt de droit public n’a été soulevé par la demanderesse en l’espèce. En outre, puisque les questions qui opposent les parties sont tranchées au moyen de l’ordonnance sur consentement visant le bien‑fondé de la revendication, il n’existe aucune question en litige que Cicyetkwu Dunstan pourrait aider le Tribunal à trancher.
[27] Enfin, la revendicatrice fait valoir que l’intervention proposée de Cicyetkwu Dunstan ne sert pas les intérêts de la justice. Lui accorder la qualité d’intervenante retarderait le règlement de la revendication, contribuerait au gaspillage des ressources et entraverait le déroulement de l'instance.
C. Intimé
[28] L’intimé avance plusieurs arguments selon lesquels Cicyetkwu Dunstan devrait se voir refuser la qualité d’intervenante. Les deux premiers concernent le caractère adéquat de sa demande :
L’intimé soutient que, bien que Cicyetkwu Dunstan ait déposé sa demande
«
pour son propre compte et pour le compte des autres membres de la Nation des Pukaist
»
, elle ne peut pas présenter des arguments au nom d’une Première Nation qui n’a pas encore été reconnue devant le Tribunal (souligné dans l’original; observations écrites de l’intimé, aux para 11-13);L’intimé fait valoir que les observations de Cicyetkwu Dunstan [traduction]
« n’expliquent pas pourquoi le Tribunal devrait lui accorder l’autorisation d’intervenir »
et, par conséquent [traduction]« le Canada ne sait pas quelle est la preuve à réfuter pour répondre à la demande
»
(observations écrites de l’intimé aux para 16-17).
[29] L’intimé plaide en outre que la demanderesse n’a pas satisfait au critère applicable en matière d’intervention formulé par le Tribunal dans la décision Bande indienne Metlakatla c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2018 TRPC 4 [Metlakatla]. La Couronne avance que Cicyetkwu Dunstan n’a pas d’intérêt direct dans le litige, qu’elle n’a pas expliqué comment elle pourrait aider le Tribunal à statuer sur la revendication dont il est saisi et qu’elle n’a soulevé aucune question de droit public.
[30] L’intimé ajoute que c’est à la Cour suprême de la Colombie-Britannique qu’il appartient de se prononcer sur le titre et les droits ancestraux revendiqués par la demanderesse. La demanderesse a déjà intenté une action devant la Cour suprême et celle‑ci a compétence pour statuer sur les droits ancestraux. De surcroît, puisque le Tribunal n’a pas compétence pour trancher la question du titre ancestral, il ne peut être porté préjudice aux intérêts de Cicyetkwu Dunstan dans le cadre de la présente instance.
[31] L’intimé a également présenté des observations sur la suspension et l’annulation de l’ordonnance sur consentement, ainsi que sur l’accès aux documents du Tribunal. Je ne les examinerai pas parce qu’elles ne portent pas directement sur la question de l’intervention dont le Tribunal est saisi. Comme je l’ai mentionné plus haut, il n’appartient pas au Tribunal de se pencher sur les observations concernant la réparation ultime sollicitée par la demanderesse.
IV. Dispositions législatives
[32] Les demandes consécutives à l’avis prévu à l’article 22 peuvent produire trois résultats différents : la reconnaissance de la qualité de partie, la reconnaissance de la qualité d’intervenant ou le rejet de la demande. Pour se voir reconnaître la qualité de partie, un demandeur doit satisfaire au critère prévu à l’article 24 de la LTRP :
Qualité de partie : première nation
24. Si elle lui en fait la demande, le Tribunal peut, s’il le juge indiqué, accorder à toute première nation avisée au titre du paragraphe 22(1) la qualité de partie.
[33] Pour se voir reconnaître la qualité d’intervenant, un demandeur doit satisfaire au critère prévu à l’article 25 de la LTRP :
Qualité d’intervenant
25 (1) Toute personne ou première nation avisée au titre du paragraphe 22(1) peut, avec l’autorisation du Tribunal, intervenir dans les procédures se déroulant devant celui-ci afin de présenter toutes observations la concernant à l’égard de ces procédures.
Facteurs à prendre en compte
(2) Pour accorder la qualité d’intervenant, le Tribunal prend en compte les facteurs qu’il estimé indiqués, notamment les frais ou délais supplémentaires qui pourraient en découler.
V. principes juridiques
[34] Le Tribunal a examiné plusieurs approches en matière d’intervention et il existe plusieurs ressemblances entre elles.
[35] Dans la décision Metlakatla, le juge Grist s’est grandement appuyé sur l’arrêt Carter v Canada (AG), 2012 BCCA 502 [Carter], dans lequel la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique souligne que l’autorisation d’intervenir est généralement accordée dans deux cas. Dans le premier cas, la personne qui se propose d’intervenir a un intérêt direct dans le litige. Dans le second cas, le litige soulève des questions de droit public mettant légitimement en jeu les intérêts du demandeur, et la personne qui se propose d’intervenir [traduction] «
apporte un point de vue différent et utile
»
sur les questions «
qui contribuera à leur règlement
»
(Metlakatla au para 24, citant l’arrêt Carter au para 13). L’arrêt Carter établit clairement que la notion d’intérêt direct est d’interprétation restrictive : les cours exigent que l’instance dans laquelle le demandeur se propose d’intervenir ait des répercussions directes sur ses droits ou lui impose des obligations juridiques supplémentaires aux effets préjudiciables directs (Metlakatla au para 24). La notion d’intérêt direct est interprétée encore plus restrictivement dans l’arrêt Ahousaht Indian Band v Canada (AG), 2012 BCCA 330 au para 3 [Ahousaht], également cité dans la décision Metlakatla :
[traduction] L’intervenant proposé doit démontrer que la décision d’appel déterminera directement ses droits ou ses responsabilités. Le simple fait que le jugement d’appel puisse créer un précédent qui aura une incidence sur la situation juridique du demandeur ne constitue pas un intérêt direct. [Metlakatla au para 25]
[36] Dans la décision Nation Tsleil-Waututh c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2014 TRPC 11 au para 27 [Tsleil-Waututh], le juge Whalen a concentré son attention sur les facteurs énoncés dans les décisions Rothmans, Benson & Hedges Inc c Canada (Procureur général), [1990] 1 CF 74 et Conseil de la bande de Pictou Landing c Canada (Procureur général), 2014 CAF 21, qui ont orienté la réflexion des juges sur la question des demandes d’intervention. Ces facteurs intègrent l’analyse de l’arrêt Carter sur les différences entre la qualité pour agir découlant d’un intérêt direct et la qualité pour agir dans l’intérêt public. Les facteurs énoncés dans la décision Rothmans, Benson & Hedges Inc c Canada (Procureur général), [1990] 1 CF 74 au para 12 sont les suivants :
1) La personne qui se propose d’intervenir est‑elle directement touchée par l’issue du litige?
2) Y a‑t‑il une question qui est de la compétence des tribunaux ainsi qu’un véritable intérêt public?
3) S’agit‑il d’un cas où il semble n’y avoir aucun autre moyen raisonnable ou efficace de soumettre la question à la Cour?
4) La position de la personne qui se propose d’intervenir est-elle défendue adéquatement par l’une des parties au litige?
5) L’intérêt de la justice sera‑t‑il mieux servi si l’intervention demandée est autorisée?
6) La Cour peut‑elle entendre l’affaire et statuer sur le fond sans autoriser l’intervention?
[37] Des facteurs similaires ont été énoncés par le juge Stratas de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Conseil de la bande Pictou Landing c Canada (Procureur général), 2014 CAF 21 au para 11 :
I. La personne qui désire intervenir s’est‑elle conformée aux exigences procédurales particulières énoncées au paragraphe 109(2) [des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106]? La preuve présentée à l’appui est‑elle précise et détaillée? [...]
II. La personne qui désire intervenir a‑t‑elle un intérêt véritable dans l’affaire dont la Cour est saisie, permettant ainsi de garantir à la Cour qu’elle possède les connaissances, les compétences et les ressources nécessaires et qu’elle les consacrera à l’affaire dont la Cour est saisie?
III. En participant au présent appel de la manière qu’elle se propose, la personne qui désire intervenir fournira‑t‑elle à la Cour d’autres précisions et perspectives utiles qui l’aideront effectivement à la prise d’une décision?
IV. Est‑il dans l’intérêt de la justice d’autoriser l’intervention? Par exemple, l’affaire dont la Cour est saisie comporte‑t‑elle une dimension publique importante et complexe, de sorte que la Cour doit prendre connaissance d’autres points de vue que ceux exprimés par les parties à l’instance? La personne qui désire intervenir a‑t‑elle participé à des procédures antérieures concernant l’affaire?
V. L’intervention désirée est‑elle incompatible avec les exigences énoncées à l’article 3 [des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106], à savoir de permettre « d’apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible »? L’intervention devrait‑elle être assujettie à des conditions qui pourraient répondre aux exigences prévues à l’article 3?
[38] Enfin, dans la décision Bande Beardy’s et Okemasis nos 96 et 97 c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2012 TRPC 1, le juge Slade, ancien président du Tribunal, s’est fondé sur les arrêts EGALE Canada Inc v Canada (AG), 2002 BCCA 396 et R v Watson and Spratt, 2006 BCCA 234 pour motiver sa décision sur une demande d’intervention. Ces arrêts présentent des similarités patentes avec l’arrêt Carter puisqu’ils portent principalement sur la question de l’intérêt direct par rapport à celle de l’intérêt public. Le juge Slade cite le paragraphe 7 de l’arrêt EGALE Canada Inc v Canada (AG), 2002 BCCA 396:
[traduction] En règle générale, avant d’autoriser un demandeur à intervenir, le tribunal devrait examiner si ce demandeur a un intérêt direct dans le litige ou s’il peut contribuer de manière utile à un examen des questions en litige ou apporter à l’égard de ces dernières une perspective différente de celle des parties. Lorsqu’une demande d’intervention est déposée relativement à une question de droit public, cette demande peut être autorisée même si le demandeur n’a pas d’intérêt direct dans l’appel.
[39] La question de l’intervention fondée sur l’intérêt direct plutôt que sur l’intérêt public est importante, peu importe l’approche suivie. Les cours et le Tribunal ont généralement interprété restrictivement la question de l’intervention fondée sur l’intérêt direct : les questions que soulève la personne qui se propose d’intervenir doivent être étroitement associées à celles dont le décideur est déjà saisi.
VI. Compétence du Tribunal
[40] L’action introduite par Cicyetkwu Dunstan devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique est une action en revendication d’un titre ancestral. La revendication de titre ancestral est expressément exclue par la LTRP à l’alinéa 15(1)f) :
Réserve
15 (1) La première nation ne peut saisir le Tribunal d’une revendication si, selon le cas :
[...]
f) elle est fondée sur des droits ou titres ancestraux, ou invoque de tels droits ou titres;
[41] En outre, la prétendue Nation des Pukaist ne peut saisir directement le Tribunal d’une revendication en application de l’article 14 parce qu’elle n’est pas encore reconnue comme une Première Nation et pourrait ne jamais l’être. L’article 14 de la LTRP prévoit ce qui suit :
Revendications admissibles
14 (1) Sous réserve des articles 15 et 16, la première nation peut saisir le Tribunal d’une revendication fondée sur l’un ou l’autre des faits ci-après en vue d’être indemnisée des pertes en résultant [...] [Non souligné dans l’original.]
[42] Cicyetkwu Dunstan est préoccupée du fait que, puisqu’elle n’est pas une Première Nation, elle ne peut se voir reconnaître la qualité de partie. Voici ce qu’elle dit au paragraphe 15 de ses observations écrites :
[traduction] […] au vu des questions en litige soulevées et du contexte actuel marqué par le besoin de rapprochement avec les Premières Nations, il est désolant de constater que, en vertu de la Loi sur le Tribunal des revendications particulières, les membres de la Nation des Pukaist ne répondent pas à la définition de « Première Nation » et n’ont donc pas la qualité pour agir devant le présent Tribunal.
[43] Malgré les préoccupations soulevées par Cicyetkwu Dunstan, la compétence du Tribunal est limitée par la LTRP.
VII. Analyse
A. Généralités
[44] Il ressort des documents dont je dispose que Pukaist est un village situé sur la rive est de la rivière Thompson, et qu’il y est établi depuis des temps immémoriaux (Recueil condensé des documents de la demanderesse, pièce F, à 122). Dans sa plaidoirie, l’avocat de Cicyetkwu Dunstan a fait valoir que [traduction]«
plusieurs des membres de la Nation des Pukaist continuent de vivre dans leur village traditionnel, ainsi que dans ses alentours, sur la rive est de la rivière
»
(enregistrement sonore de l’audience, le 20 janvier 2023, aux environs de 12 h 30, heure de l’Est (Ottawa)).
[45] La demanderesse invoque le paragraphe 44 de la décision Tsleil-Waututh sur lequel le juge Grist s’est fondé pour ordonner la délivrance de l’avis prévu à l’article 22 :
Vu le double objectif de rapprochement et d’accès à la justice que vise le règlement des revendications historiques des Premières Nations, j’estime que, à ce moment‑ci et pour ce qui est d’accorder la qualité d’intervenant, l’approche du Tribunal devrait être libérale et souple. La LTRP est clairement une loi réparatrice et, pour cette raison, le droit appuie l’adoption d’une approche libérale qui donnera effet à son objet [...] [observations écrites de la demanderesse au para 18; Metlakatla au para 26].
[46] La demanderesse laisse entendre que c’est ce qui explique pourquoi le juge Grist a jugé que l’action en revendication de titre ancestral, qui chevauche la revendication présentée par la bande indienne de Cook’s Ferry «
répond au critère selon lequel la décision du Tribunal doit avoir des répercussions importantes sur les intérêts d’une personne
»
(Bande indienne de Cook’s Ferry c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2022 TRPC 3 au para 14). À mon sens, Cicyetkwu Dunstan confond le critère prévu à l’article 22 avec celui que le Tribunal applique pour trancher une demande d’intervention. Le premier est peu rigoureux alors que le second l'est.
[47] Je conviens que je devrais avoir recours à une approche libérale pour trancher les demandes d’intervention. Néanmoins, lorsqu’il applique cette approche, le Tribunal doit s’assurer que la personne qui se propose d’intervenir satisfait aux critères juridiques pertinents. En d’autres termes, cette approche libérale ne lui permet pas de se soustraire à la nécessité de respecter les normes de l’analyse juridique et, s’agissant de la personne qui se propose d’intervenir, à celle de respecter les prescriptions de la LTRP.
[48] Les facteurs susmentionnés, dont il faut tenir compte pour statuer sur la reconnaissance de la qualité d’intervenant, doivent être recontextualisés pour le Tribunal. L’énumération suivante constitue ma reformulation des facteurs pertinents pour la présente demande, que j’ai tirés des sources mentionnées plus haut :
La personne qui se propose d’intervenir sera-t-elle directement touchée par l’issue du litige?
Dans la négative, existe‑t‑il un intérêt de droit public?
La position de la personne qui se propose d’intervenir est‑elle défendue adéquatement par l’une des parties à l’instance?
La personne qui se propose d’intervenir dispose‑t‑elle d’autres moyens de faire valoir sa cause dans le système judiciaire?
Les intérêts de la justice seront-ils mieux servis si l’intervention demandée est autorisée?
Le Tribunal peut-il entendre l’affaire et statuer sur le fond sans autoriser l’intervention?
B. Application des principes juridiques
1. L’intérêt direct dans l’instance
[49] Au paragraphe 3 de l’arrêt Ahousaht, le juge Groberman a conclu que [traduction] «
la personne qui se propose d’intervenir doit démontrer que, dans le cadre de la décision, le décideur [...] statuera directement sur ses droits ou ses obligations
».
Cicyetkwu Dunstan convient qu’il s’agit du critère applicable en l’espèce. Elle invoque le paragraphe 24 de la décision Metlakatla, qui lui-même renvoie au paragraphe 12 de l’arrêt Carter, où est énoncé le critère des «
répercussions directes
»
applicable aux demandes d’intervention :
[traduction] De façon générale, l’intervention est autorisée dans deux cas. Dans le premier cas, le demandeur a un intérêt direct dans le litige, en ce sens que l’issue de l’appel aura des répercussions directes sur ses droits ou lui imposera des obligations juridiques supplémentaires en ayant un effet préjudiciable direct. Le fait que l’issue puisse ultimement avoir un effet préjudiciable sur des membres individuels de l’intervenant proposé n’est toutefois pas suffisant pour constituer l’intérêt direct nécessaire, car la Cour n’examinerait pas directement leurs droits ou obligations dans le cadre l’appel : Ahousaht Indian Band v. Canada (Attorney General), 2012 BCCA 330 aux para 4-8, 325 B.C.A.C. 312 (le juge Groberman, en chambre), conf. en révision, 2012 BCCA 404. [observations écrites de la demanderesse au para 16]
[50] La revendicatrice et l’intimé affirment tous deux que Cicyetkwu Dunstan n’a pas dit en quoi elle était directement touchée par la présente instance.
[51] Cicyetkwu Dunstan revendique un intérêt dans le litige lorsqu’elle fait valoir, au paragraphe 12 de ses observations écrites, que [traduction] «
les membres de la Nation des Pukaist estiment qu’ils forment la collectivité légitime avec qui le gouvernement fédéral devrait entamer des négociations sur les terres préemptées de la RI 10
».
Elle fait valoir que la Nation des Pukaist n’a jamais consenti à ce que d’autres personnes la représentent et que celle‑ci possède un intérêt dans la RI 10. Toutefois, se fondant sur la LTRP, Cicyetkwu Dunstan a présenté sa demande à titre personnel et elle n’agit pas — du moins pas en l’espèce — pour le compte des membres de la Nation des Pukaist.
[52] L’arrêt Ahousaht est ici utile. Dans cette affaire, la Première Nation sollicitait, dans l’action sous‑jacente, un jugement déclaratoire reconnaissant son droit ancestral de pêcher à des fins commerciales. La Cour d’appel de la Colombie-Britannique était appelée à statuer sur les demandes d’interventions présentées par deux organisations de l’industrie halieutique. Celles‑ci faisaient valoir qu’elles avaient un intérêt direct dans le litige parce qu’un jugement déclaratoire reconnaissant des droits ancestraux à la Première Nation Ahousaht aurait inévitablement pour effet de réduire les quotas de pêche de leurs membres. Au paragraphe 8 de sa décision, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique exprime ainsi son désaccord :
[traduction] À mon avis, il ne s’agit pas d’un intérêt direct dans le litige. La Cour ne soupèsera pas directement, dans le présent appel, les droits et les obligations des membres des organisations qui se proposent d’intervenir. Bien que la décision portant sur les droits des intimées puisse avoir ultimement des répercussions sur la quantité disponible de poissons à pêcher par les membres des intervenantes, il s’agit d’une incidence indirecte du litige. Pour que la Cour accorde la qualité d’intervenant, ce doit alors être parce que les demandeurs ont un point de vue important à offrir sur une question d’importance publique.
[53] Les faits sous‑tendant la demande de Cicyetkwu Dunstan sont semblables à ceux de l’affaire Ahousaht. Cicyetkwu Dunstan n’a pas démontré que l’issue de la présente instance aurait des répercussions directes sur ses droits ni qu’elle lui imposerait des obligations juridiques supplémentaires. L’instance sous‑jacente concerne un droit de passage ferroviaire; il ne s’agit pas d’une affaire portant sur un titre, un regroupement irrégulier ou une préemption illégale. Bien que le bien‑fondé de la revendication ait été admis en l’espèce, cette admission n’aura pas de répercussions directes sur Cicyetkwu Dunstan.
[54] Dans la mesure où Cicyetkwu Dunstan revendique un titre ancestral devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique, la décision du Tribunal ne liera pas cette dernière et n’aura donc aucun effet préjudiciable sur les revendications de Cicyetkwu Dunstan ou de la prétendue Nation des Pukaist dont la cour est saisie. De surcroît, comme il a été plaidé, la revendication n’aura pas d’effet préjudiciable sur les prétendus intérêts de Cicyetkwu Dunstan. Celle-ci ne peut subir de préjudice puisqu’à titre personnel, elle ne satisfait pas au critère prévu par la LTRP pour saisir le Tribunal d’une revendication. Comme il est mentionné au paragraphe 21 de la décision Metlakatla : « [...]
la qualité d’intervenant n’est pas la qualité de partie. Elle se limite à la fonction décrite au paragraphe 25(1), qui consiste à “présenter toutes observations [...] concernant [la personne ou première nation] à l’égard de ces procédures”
».
[55] En outre, l’existence d’un intérêt théorique ou d’un intérêt général dans l’instance ne suffit pas pour fonder un intérêt direct (Tsleil-Waututh au para 49).
[56] Cicyetkwu Dunstan n’a pas démontré qu’elle possédait un intérêt direct dans la présente instance. Elle le reconnaît essentiellement au paragraphe 17 de ses observations écrites lorsqu’elle déclare que, parce que les questions préliminaires n’ont pas été tranchées :
[traduction] [...] il est difficile de savoir comment [elle] peut soutenir que l’issue de la présente revendication aura des répercussions directes sur ses droits ou lui imposera des obligations juridiques supplémentaires qui auront un effet préjudiciable direct. Au mieux, [elle] fait valoir qu’étant donné qu’elle est membre inscrite de la Première Nation de Lytton, ses intérêts individuels ne sont pas représentés adéquatement par la bande indienne de Cook's Ferry.
2. L’intérêt de droit public
[57] Lorsqu’un demandeur n’a pas d’intérêt direct dans l’instance, le Tribunal peut néanmoins lui reconnaître la qualité d’intervenant si l’appel soulève une question de droit public qui peut légitimement mettre en cause les intérêts du demandeur. Pour se voir reconnaître la qualité d'intervenant, le demandeur doit présenter un point de vue différent et utile sur les questions en litige qui aidera le décideur à les trancher.
[58] Cicyetkwu Dunstan n’a pas expliqué en quoi ses prétentions relèveraient de la catégorie des questions de droit public. Elle n’a soulevé aucun fait ou argument tendant à démontrer que ses intérêts font intervenir un intérêt public important tel que le Tribunal nécessiterait son intervention, ou que celle-ci lui serait utile. Elle n’a pas expliqué comment sa participation à l’instance apporterait une contribution utile ni comment elle pourrait faire valoir un point de vue différent sur les questions en litige, telles qu’elles sont actuellement formulées. En fait, la demande et les observations de Cicyetkwu Dunstan ne décrivent pas la manière dont elle entend participer à l’instance ni comment sa participation pourrait aider le Tribunal. Ces renseignements doivent figurer dans toute demande d’autorisation d’intervenir fondée sur l’article 45 des Règles de procédure du Tribunal des revendications particulières, DORS/2011-119.
[59] Cicyetkwu Dunstan se contente simplement, tout au long de ses observations et des deux affidavits qu’elle a produits, de défendre les intérêts de la Nation des Pukaist sur lesquels la Cour suprême de la Colombie-Britannique est déjà appelée à se prononcer. Dans la mesure où ces questions sont des questions d’intérêt public, elles ne relèvent pas de la compétence du Tribunal (alinéa 15(1)f) de la LTRP).
[60] Je prends également note qu’il ne reste que quelques questions, s’il en est, à régler par les parties. La revendication est bien fondée et les parties sont en train de négocier le montant de l’indemnité que le Canada doit verser à la bande indienne de Cook's Ferry. J’ai été avisée que les parties sont sur le point de parvenir à un règlement sur la question de l’indemnité.
[61] Cicyetkwu Dunstan n’a pas établi l’existence d’une d’intérêt public qui justifierait son intervention dans la présente instance.
3. La position de la personne qui se propose d’intervenir est-elle défendue adéquatement par l’une des parties à l’instance?
[62] Cicyetkwu Dunstan affirme que [traduction] «
ses intérêts individuels ne sont pas adéquatement représentés par la bande indienne de Cook’s Ferry
» et
appuie sa demande d’intervention sur cette affirmation. J’admets que sa position n’est pas défendue par l’une des parties à la revendication dont je suis saisie. Alors qu’un tel constat milite généralement en faveur de la reconnaissance de la qualité d’intervenant, dans le présent cas, l’analyse aboutit à la conclusion contraire.
[63] Les prétentions avancées par Cicyetkwu Dunstan dans le cadre de sa demande sont semblables à celles qu’elle fait valoir devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique. Il s’agit de revendications de titre et de droits ancestraux lesquelles, comme nous l’avons dit plus haut, outrepassent la compétence du Tribunal. Cicyetkwu Dunstan soutient également que la prétendue Nation des Pukaist et la bande indienne de Cook’s Ferry ont été réunies à tort en un seul groupe. Selon elle, la RI 10 a aussi été erronément attribuée à cette dernière. Le Tribunal n’est pas appelé à se prononcer sur ces prétentions selon les présents actes de procédure. Il ne fallait donc pas s’attendre à ce que la bande indienne de Cook's Ferry les défende.
[64] La décision Metlakatla est utile sur ce point. Dans cette affaire, la revendicatrice réclamait une indemnité pour la cession des terres de réserve destinées à la construction d’un terminus du chemin de fer dans le nord-ouest de la Colombie‑Britannique. La revendicatrice plaidait, entre autres choses, que le prix payé pour les terres était insuffisant et que l’entente était donc abusive. Une première Nation voisine, la bande indienne Kitsumkalum, avait présenté une demande pour être autorisée à intervenir à l’instance. Elle faisait valoir que la division de la Réserve no 2 de Tsimpsean de 1892 — au terme de laquelle la partie sud avait été attribuée à la réserve de la bande indienne de Metlakatla et la partie nord à la Première Nation des Lax Kw’alaams — contrevenait à la Loi sur les Indiens. Elle plaidait plus précisément que l’intérêt bénéficiaire qu’elle possédait dans la réserve indienne no 2 de Tsimpsean avant sa division avait été révoqué et attribué d’une manière irrégulière à la bande Indienne Metlakatla et à la Première Nation des Lax Kw’alaams. La bande indienne de Kitsumkalum affirmait que son intervention était justifiée parce que[traduction] «
toute conclusion de fait concernant la division de 1892 pourrait porter un grave préjudice à la revendication de Kitsumkalum
»
dont le Tribunal était saisi (para 10).
[65] Au paragraphe 21 de la décision Metlakatla, le juge Grist a dit que la qualité d’intervenant «
se limite à la fonction décrite au paragraphe 25(1) [de la LTRP], qui consiste à “présenter toutes observations [...] concernant [la personne ou première nation] à l’égard de ces procédures
” ».
(Non souligné dans l’original) Cicyetkwu Dunstan n’a présenté aucun argument qui soit pertinent pour les questions soulevées par les parties.
[66] Dans la décision Metlakatla, le juge Grist a fait observer que l’intervention proposée était «
fondée sur un prétendu intérêt direct
»
, mais il a conclu que la revendication présentée par la bande indienne Metlakatla se rapportait principalement à des événements survenus en 1906. Il a jugé qu’«
un changement d’orientation marqué vers la division de 1892 serait, compte tenu des actes de procédure actuels, embarrassant et, par conséquent, préjudiciable
»
(para 28–29). En outre, mettre l’accent sur les mesures contestées risquerait «
d’élargir les questions en litige bien au‑delà de ce qui est actuellement soulevé »
(para 39). Sur ce fondement, il a rejeté la demande d’intervention.
[67] Bien qu’au moins deux faits distinguent cette affaire de celle qui nous occupe — notamment que la personne qui se proposait d’intervenir était une Première Nation reconnue et qu’elle avait présenté sa propre revendication devant la Direction générale des revendications particulières — l’analyse qui précède s’applique également en l’espèce. Les autres parties ne défendent pas la thèse de Cicyetkwu Dunstan parce qu’elle n’est pas pertinente pour l’affaire dont je suis saisie. Elle porte essentiellement sur des événements qui sont bien antérieurs aux prises litigieuses en l’espèce.
4. L’autre moyen pour la demanderesse de faire valoir sa cause dans le système judiciaire
[68] Compte tenu des similarités qu’il y a entre la revendication dont est saisie la Cour suprême de la Colombie-Britannique et les prétentions que la demanderesse soulève dans la présente demande, il est manifeste que Cicyetkwu Dunstan dispose d’un autre moyen pour obtenir réparation. Non seulement il existe un autre forum approprié pour Cicyetkwu Dunstan, mais le Tribunal est un forum inapproprié puisqu’il n’a pas compétence pour statuer sur la plupart de ses prétentions.
5. Les intérêts de la justice
[69] La mission du Tribunal est de statuer sur des revendications particulières historiques, et ce, afin de contribuer au rapprochement entre les Premières Nations et la Couronne. Dans ce contexte, il pourrait sembler que les intérêts de la justice seraient servis par l’octroi de l’autorisation d’intervenir. Toutefois, je ne suis pas convaincue que ce soit le cas lorsque j’applique les critères applicables en matière d’intervention. Je me fonde sur le raisonnement exposé par le juge Grist au paragraphe 24 de la décision Metlakatla (où il s’appuie sur le raisonnement tiré du paragraphe 14 de l’arrêt Carter) :
[traduction] Les facteurs qui militent contre l’octroi de la qualité d’intervenant comprennent la possibilité que l’intervenant élargisse la portée de l’instance en soulevant de nouvelles questions ou des questions non pertinentes, ou crée un fardeau indu ou une injustice pour les parties à l’appel en les obligeant, par exemple, à répondre à des arguments répétitifs [...] l’intervenant peut seulement présenter des observations qui se rapportent aux faits et questions énoncés dans les mémoires des parties, sauf ordonnance contraire d’un tribunal. [Non souligné dans l’original.]
[70] Compte tenu de ce qui précède, les intérêts de la justice militent contre l’octroi du droit d’intervenir. Les questions que Cicyetkwu Dunstan entend soulever ne se [traduction] «
rapportent [pas] aux faits et questions énoncés dans les mémoires des parties
».
Elle avance plutôt des nouvelles questions qui outrepassent la compétence du Tribunal ou qui ne sont pas soulevées par les parties.
[71] Cicyetkwu Dunstan admet au paragraphe 12 de ses observations écrites que [traduction] «
plusieurs questions doivent être tranchées
»
avant que le Tribunal ne puisse adéquatement se pencher sur sa demande. Elle reconnaît également que la plupart de ces questions [traduction] «
ne relèvent pas de la compétence du Tribunal des revendications particulières
».
Comme elle le dit, ces questions portent notamment sur ce qui suit :
[traduction]
i. Un accord ou une ordonnance aux termes desquels les membres de la Nation des Pukaist possèdent un titre ancestral sur le territoire revendiqué.
ii. Un accord ou une ordonnance aux termes desquels la Réserve indienne no 10 de Pokheitsk a été irrégulièrement attribuée à la bande indienne de Cook’s Ferry, alors que l’attribution aurait plutôt dû être faite à la Première Nation des Pukaist.
[72] Au paragraphe 60 de la décision Tsleil-Waututh, le juge Whalen a indiqué qu’un intervenant ne devrait «
[causer] aucun retard, gaspillage de ressources ou autre préjudice, et [ne devrait pas entraver] sérieusement le déroulement de l’instance
».
Cet énoncé est étayé par le paragraphe 25(2) de la LTRP qui prévoit ce qui suit :
(2) Pour accorder la qualité d’intervenant, le Tribunal prend en compte les facteurs qu’il estimé indiqués, notamment les frais ou délais supplémentaires qui pourraient en découler.
[73] Les prétentions soulevées par Cicyetkwu Dunstan menacent d’élargir la portée des questions bien au-delà de celles qui sont actuellement soulevées, ce qui pourrait faire dérailler ce qui, selon toute apparence, constitue des discussions sérieuses fort avancées en vue d’un règlement.
[74] Il n’est pas dans les intérêts de la justice de permettre à Cicyetkwu Dunstan d’élargir la portée des questions dont le Tribunal est saisi dans le cadre de la présente revendication, surtout à une étape aussi avancée du processus. Élargir la portée des questions litigieuses afin d’inclure les questions soulevées par Cicyetkwu Dunstan pourrait gravement gêner le déroulement de l’instance. Cela provoquerait des retards et augmenterait les coûts associés à l’affaire ainsi que la durée de l’instance.
[75] Il n’est pas dans les intérêts de la justice que Cicyetkwu Dunstan se voit reconnaître la qualité d’intervenant dans la présente instance.
6. Statuer sur le fond sans l’aide de l’intervenante
[76] Le Tribunal peut statuer sur le fond de l’affaire sans l’aide de Cicyetkwu Dunstan. À mon sens, reconnaître la qualité d’intervenante à Cicyetkwu Dunstan viendrait embrouiller la situation pour les parties. Cela est d’autant plus vrai que les parties se sont déjà entendues sur le bien‑fondé de la revendication. De surcroît, les parties sont parvenues à une entente de principe sur le montant de l’indemnité.
[77] Si Cicyetkwu Dunstan et la prétendue Nation des Pukaist ont gain de cause devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique, elles pourront solliciter réparation devant un autre forum. Sans me prononcer sur la question, je ne vois pas comment le fait de ne pas intervenir dans la présente instance porterait préjudice à tout recours ultérieur de la prétendue Nation des Pukaist.
VIII. Conclusion
[78] Pour conclure, la question dont le Tribunal est saisi a une portée restreinte, à savoir si la demanderesse possède un intérêt direct dans la revendication ou, si une question de droit public est soulevée, si elle peut contribuer de manière utile ou apporter un point de vue différent. Ce point de vue ne devrait pas détourner le litige des questions soulevées par les parties et ne devrait pas non plus compliquer inutilement l’instance, ni entraîner des frais inutiles.
[79] J’estime que la demanderesse n’a pas d’intérêt direct dans la revendication. La présente demande contient des affirmations identiques ou semblables à celles contenues dans l’avis de poursuite civile déposé à la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Rien dans la revendication sous‑jacente n’aura de répercussions directes sur les droits ou les obligations de Cicyetkwu Dunstan. De plus, celle-ci n’a pas été en mesure d’expliquer en quoi ses prétentions soulèvent une question de droit public.
[80] Comme le juge Whalen l’a souligné au paragraphe 44 de la décision Tsleil‑Waututh, il importe d’adopter une interprétation large qui permette aux «
Premières Nations
»
de bénéficier d’une «
audience complète et équitable, qui s’accorde avec l’objectif de règlement et de rapprochement de la LTRP
».
Malheureusement, puisque la prétention ultime de Cicyetkwu Dunstan est la reconnaissance d’un titre ancestral — une question que la Loi ne permet pas au Tribunal d’examiner —lui permettre d'intervenir ne «
s’accorde [pas] avec l’objectif [...] de la LTRP
».
Les autres prétentions soumises par Cicyetkwu Dunstan détourneraient le litige des questions soulevées par les parties et compliqueraient inutilement l’instance, tout en entraînant des frais inutiles. Sa participation entraverait le règlement efficace et opportun de la présente affaire.
[81] En me fondant sur la compétence limitée conférée au Tribunal par sa loi habilitante et sur les facteurs à considérer dans une demande d’intervention, je conclus que l’intervention de Cicyetkwu Dunstan n’est pas justifiée. Par conséquent, je refuse d’exercer mon pouvoir discrétionnaire d’accueillir la présente demande.
[82] De ce fait, je ne peux me pencher sur les autres mesures de réparation sollicitées par Cicyetkwu Dunstan. Cette dernière n’a la qualité nécessaire pour faire valoir sa cause. Sans la qualité d’intervenante, elle ne peut pas saisir le Tribunal de ses prétentions.
[83] Il semble que Cicyetkwu Dunstan ne sera pas surprise par la présente décision. En effet, comme elle l’écrit au paragraphe 20a de ses observations écrites :
[traduction] Que le Tribunal juge ou non que Mme Dunstan a qualité pour agir, l’objectif de cette demande est, avant tout, de rappeler aux décideurs qui pourraient prononcer des décisions qui touchent directement les prétendus intérêts de la Nation des Pukaist, 1) que celle‑ci existe bel et bien; 2) qu’elle continuera de chercher à se faire reconnaître par le Canada en tant que collectivité distincte; et 3) que si elle a gain de cause, elle entend revenir sur les décisions, comme celle sollicitée dans la présente demande, avec les parties concernées.
[84] Cicyetkwu Dunstan a avisé les parties et le Tribunal de l’action dont est saisie la Cour suprême de la Colombie-Britannique et de ses préoccupations à l’égard de la présente instance.
IX. DÉCISION
[85] Je rejette la demande de Cicyetkwu Dunstan d’intervenir dans la présente instance.
[86] L’autre mesure de réparation demandée est rejetée vu l’absence de qualité pour agir.
[87] Dès à présent, les parties devront aviser Cicyetkwu Dunstan de tout changement important dans les actes de procédures qui auraient des répercussions sur ses intérêts.
[88] Enfin, j’ordonne au greffe de retirer du dossier le document déposé par la demanderesse, le 23 janvier 2023, ainsi que la lettre de la revendicatrice déposée le 27 janvier 2023.
L’honorable Diane MacDonald
|
Traduction certifiée conforme
Édith Malo, LL.B.
TRIBUNAL DES REVENDICATIONS PARTICULIÈRES
SPECIFIC CLAIMS TRIBUNAL
Date : 20230131
DOSSIER : SCT‑7001-20
Ottawa (Ontario), le 31 janvier 2023
En présence de l’honorable Diane MacDonald
ENTRE :
BANDE INDIENNE DE COOK’S FERRY
Revendicatrice (Intimé)
et
SA MAJESTÉ LE ROI DU CHEF DU CANADA
Représenté par le ministre des Relations Couronne‑Autochtones
Intimé (Intimé)
et
CICYETKWU DUNSTAN
Pour son propre compte et pour le compte des autres membres de la Nation des Pukaist de la Nation des Nlakapamux
Demanderesse
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
AUX :
|
Avocat(e)(s) de la revendicatrice (intimé) BANDE INDIENNE DE COOK’S FERRY
Représentée par Me Darwin Hanna, Me Nicole Hajash et Me Caroline Roberts Callison & Hanna, Avocats |
ET AUX :
|
Avocat(e)s de l’intimé (intimé)
Représenté par Me James Mackenzie et Me Peri Smith Ministère de la Justice |
ET À :
|
Avocat de la demanderesse CICYETKWU DUNSTAN
Représentée par Me Matthew Howard Kidston & Company LLP |